La route est longue, longue, longue. Des botes usées; une cape délavée; un sac de voyage à l'air vide, c'est ainsi qu'arrive devant l'ancien bâtiment, symbole de puissance et de puissants, un homme simple. On ne discerne que mal les anciennes armoiries de la porte, encore moins celles sur la cape du voyageur, mais l'un et l'autre reflètent un passé imposant.
L'homme encapuchonné entre-ouvra sa cape pour dégager un trousseau de clefs qui commençaient à rouiller. Se saisissant d'une, il tenta d'ouvrir la porte. Sans succès! Il dû en tester plusieurs avant qu'enfin le déclic ne se fasse entendre. Remettant le trousseau à sa ceinture, il poussa l'un des battants de ses main gantées. La porte s'ouvrit dans un lent mouvement, accompagné de grincements qui ne pouvaient que laisser comprendre du peu d'utilisation et du travail des intempéries sur ces lieux.
Pénétrant dans l'entrée, qu'il avait souvent traversé, ses premiers pas soulevèrent de petits nuages de poussières. L’odeur que dégageait le hall était un mélange d'humidité, poussière, froid et âcreté. Après quelques pas il s'arrêta, se décapuchonna, et ouvrit son sac pour sortir une torche et un briquet. Une fois la torche allumée et le briquet de retour dans la besace, il continua son chemin plus rapidement. La nostalgie laissant le pas à l'envie et la curiosité, il se faufila dans les couloirs, passant chaque fois moins de temps pour ouvrir les portes qu'il rencontrait. Bien des souvenirs lui revenaient en mémoire : des discussions, des visages graves ou souriants, des moments d'allégresse, l'éclat de l'or et de l'argent, le vif des couleurs, le reflets des miroirs.
Arrivant dans un ancien bureau, il accrocha la torche à un mur. Déposant son sac sur un bureau miteux, il regarda son reflet dans un miroir bruni par le temps. Reconnaissable pour qui l'avait connu, sans doute. La rumeur circulerait certainement plus vite qu'il ne le pourrait lui même. Et pour cause...
Il ouvrit sa cape et s'en défit, la pliant sur son sac. Il contourna le bureau pour s'assoir dans le fauteuil qui était encore là derrière. S'appuyant sur les accoudoirs et entrecroisant les doigts, il lâcha dans un souffle : Je suis revenu. Il n'y avait plus qu'à attendre les autres. Ils viendraient. C'est eux qui l'avaient appelé, après tout.
La lueur dansante de la torche sur le murs d'en face ne permettait que faiblement de distinguer cet être particulier et seul dans une vieille bâtisse abandonnée. Cet homme n'était autre que Ardarín.